Affichage des articles dont le libellé est Chronique. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Chronique. Afficher tous les articles

lundi 25 mai 2015

Pablo Neruda un Grand homme

Source
J’ai passé une semaine duraille ! Pas au point de me faire sauter le caisson, quand même pas, mais suffisamment turbinante pour faire extravaguer le citron des heures durant. Je n’aurais jamais dû quitter les terres fertiles des certitudes réconfortantes héritées d’un passé sous influence. Pour des raisons que j’ignore je n’avais jamais lu « J’avoue que j’ai vécu » de Pablo Neruda, que je considérais dans mon esprit comme un acquis culturel, tant son émanation incitait au culte de la personnalité. Quand il est pauvre de culture l’humain a la foutue manie de mettre en gage au Mont-de-piété son bien le plus précieux, la liberté.
Neruda, un pseudo emprunté chez Connan Doyle, selon les propres dires de Don Pablo, dans l’un des épisodes de Sherlock, qu’il aimait à lire tout minot, tout comme il aimait les films d’indiens et l'observation méticuleuse du milieu ambiant, dont il tirait de forts jolis poèmes.
Après lecture du Chef-d’œuvre, j’ai passé ma semaine à ruminer du sordide à l’intention du Grand poète chilien, me surprenant à reprendre la lecture de Francisco Coloane pour me mettre le corgnolon à l’endroit. A croire que j’aime la douleur pour me prouver que le mal fait effectivement très mal, surtout quand il est gratuit !
Il est des mensonges qui n’ont de vérité que l’artifice qu’on leur donne pour soulager une conscience mise à mal par la réalité, tant le poids est léger aux épaules du bonimenteur. Pablo Neruda a pris plaisir à débobiner la pelote de sa vie pour nous offrir le code de conduite du petit-bourgeois : petit fonctionnaire d’Etat par piston, il a démarré à 23 ans une carrière diplomatique qui lui offrait le loisir de s’épanouir avec le monde de son époque, de Rangoon à Ceylan, de Madrid à Buenos Aires et partout où un monde en mutation avait fait de la guerre et de la destruction un art perpétuel.
Grand écrivain, Grand poète, Grand homme, Pablo Neruda s’était engagé corps et âme en faveur des républicains espagnols dans leur lutte contre le fascisme et il y donna beaucoup de sa personne pour éviter à l’Espagne une longue nuit qui dura 40 ans. Il aimait la République espagnole, mais en bon petit-bourgeois stalinien il n’aimait pas les anarchistes, pas plus que les trotskystes dont il dresse en quelques lignes définitives un portrait aussi haineux que mensonger. Si Pablo Neruda n’aimait pas Franco, il détestait tout ce qui en Espagne s’employait à faire un exemple de révolution réussie, réduisant les anarchistes à une horde de tueurs qui, au lieu de se battre sur le front contre le fascisme, préféraient exécuter des innocents à tour de bras à l’arrière-front. Sans plus de scrupule, Don Pablo dérobe à la vérité la réussite d’une révolution sociale dont anarchistes, socialistes et, dans une moindre mesure, les trotskystes étaient (cela est historiquement prouvé par des historiens indépendants) les grands précurseurs, menant de front la guerre et l’organisation sociale du camp républicain en développant un modèle de société dont aucun capitalisme, libéral ou d’Etat, ne voulait, d'où le manque de soutien de la part des démocraties au peuple espagnol, avec les conséquences que l'on sait. Mais de cela le stalinien Pablo Neruda n’avait que faire ! Il avoue même dans ces mémoires ne rien regretter de ses choix et de son engagement militant.
C’est toujours lui qu’on retrouve à Marseille, après la défaite républicaine, affrétant des bateaux pour embarquer des exilés espagnols, dont le sort en France n’était pas des plus enviable, vers l’Amérique Latine, le Chili en particulier, prenant soin de ne délivrer de laissez-passer en priorité qu’aux encartés staliniens ! Exemplaire !
Je me console, un peu, en me disant qu’au moins je sais que le « Grand homme » est une notion aussi improbable que de chercher à ripoliner des plinthes avec une échelle à coulisse !


Sous l'casque d'Erby



dimanche 17 mai 2015

Emmanuel Tod en toute liberté

Source image
De toute évidence, Emmanuel Todd, avec son livre « Qui est Charlie ? » a mis les sabots dans le plat du « laïcisme radical » à déguisement républicain que c’est plaisir à suivre si la levée de boucliers n'était pas porteuse de drames futurs. Je l’ai lu et je ne comprends toujours pas où est la cause d’un tel effet.
Furibards, le ban et l’arrière-ban de l’ordre médiatique, néo Charliens, bébés de la maternité en quête de sein maternel, chiens, chats et volaille, se sont levés d’un bloc pour jaboter au scandale, à la honte, à la folie d’un brûlocrate extravagant, n’ayant qu’une idée toute simple en tête : nous mettre en garde contre l’instrumentalisation et la prise en otage du pays par une minorité haineuse et une classe politique opportuniste, abîmée dans la surenchère d’un nébuleux mais très juteux esprit du 11 janvier 2015, une vaste mascarade.
Juste si on ne crie pas « A l’échafaud, le traître » ! Et cela a commencé bien avant la sortie en librairie de cet essai salutaire, portant le sous-titre de « sociologie d'une crise religieuse ». Crise qui arrange de bien sombres affaires !
Mon libraire à qui je passais des coups de fils répétés, histoire de monter dans le wagon, sans me casser la gueule, me répondait : « Désolé Rod, je ne l’ai pas encore dans les cartons ». Merveilleusement étrange, non, que tout ce monde soit au balcon brandissant l’autodafé, que les forces de police traversent les rames des trains de campagne pour rassurer le passager assoupi sur des lignes ferroviaires qu’aucun terroriste n’emprunte jamais, juste pour montrer que le front républicain est là qui veille au grain ? Si la bombe d’un kamikaze assez égaré pour aller se perdre dans ces trous perdus explose à ce moment, pour sûr que policiers et passagers sommes bons pour le voyage final et la Une médiatique subséquente ! Rien de tel en notre paisible campagne et c’est tant mieux ! Si l'humanité n'a jamais marché sur la lune, ici-bas elle marche sur la tête !
Comme le clamait feu Roger Gicquel, présentateur, en ouverture du journal télévisé d’une chaîne libérale quelconque à propos de n’importe quel ennemi public n°1 : « La France a peur ! »
Sûr que quand il s’agit de tripatouiller l’opinion, le 4ème pouvoir ne s’embarrasse pas de subtilités pas plus que de vérité. Détails que la foule embarquée dans la galère ne distingue que par le viseur de celui qui l’amène à cautionner l'inqualifiable et qui, hier comme aujourd’hui, dans l’euphorie, l'accepte sans broncher. C’est qu’il y avait dans le mouvement spontané du 11 janvier deux volontés contradictoires : d’un côté le commun, totalement à la rue, choqué, égaré, en colère, et de l’autre l’industriel, le politique, le marchand de guerre, l’amalgameur, celui qui instrumentalise, dirige, ordonne et légifère. Comment, dès lors, distinguer dans le noir celui qui vous vole la conscience ? Un acte de pickpocket dont on peut à la rigueur saluer l’adresse et l’audace, mais en aucun cas le justifier. Au commissariat, encore sous le choc, la victime est sûre d’avoir été volée mais ignore par qui. Devant le défilé de suspects alignés devant la glace sans tain, elle finit par lâcher : « Voyez, monsieur l’agent, je ne voudrais faire de tort à quelqu'un, mais, là, derrière la vitre, je ne reconnais personne. Désolé ! ».
Au final, après lecture, je ne trouve pas dans le livre d’Emmanuel Todd trace d’éléments pouvant justifier la fièvre haineuse qu’il a déclenchée. Pas plus que je n’ai trouvé chez lui d’autre souci que celui d’un esprit noble mettant en garde tout ce qui vit et respire en ce pays contre la perversion du pouvoir politique et autres dérivés hautement toxiques pour l'équilibre d'une société pluriculturelle, ne perdant pas de vue un instant la pauvreté comme élément central de toute crise politique et sociale, une jeunesse à la rue, et le délire généralisé pouvant nous entraîner vers des nouvelles barbaries, dénonçant une élite tapant sur le faible et se prosternant devant plus fort qu'elle, sacrifiant son industrie, les valeurs qui ont fait la grandeur de la nation, abandonnant le monde ouvrier, déclenchant une guerre de religion qui in fine fragilisera le pays. La cartographie qui étaye le propos est très édifiante…
Une telle mise en garde mérite-t-elle un tel vacarme ? Une telle débauche dans la bassesse ?... Si la réponse est oui, c’est que nous avons perdu toute forme de lucidité et sommes dès lors faits comme des rats ! Ce n'est pas l'état dans lequel on nous plonge ?... Un peu de sang-froid, les amis, Emmanuel Todd est un homme qui cherche le meilleur pour son pays et cela est à mettre à son crédit.
Livre qu'il faut lire autrement que par ouï-dire !...


Sous l'casque d'Erby