|  | 
| Illustration B.mode ruminances | 
A mes amis Pascale et B.mode
Que penser d'un homme qui vit dans quatre lieux différents selon que le vent pousse d'un côté ou de l'autre ? Qu'il s'agit de quelqu'un qui a de la ressource, de la chance, du nez, et un bon sens de l'orientation. On ne peut que le féliciter pour l'aubaine. Que penser d'un homme dont la maman règle ses amendes ou son retour à la maison en autobus avec des timbres poste ou des bombons à la sortie du commissariat où il vient d'y passer la nuit ? Que la dame a le sens du troc et des affaires. Qu'elle s'occupe bien de son petiot malgré son âge mûr. Qu'elle peut se déplacer avec peu de bagages, que l'époque qu'elle traverse est riche d'un art de vivre qu'on peut aujourd'hui regretter. C'était l'époque, dit l'auteur, où les gendarmes parlaient encore aux détenus.
Que penser d'une maman qui couche avec son accordéon ?… Qui dort  avec, nuance ! Qu'elle connaît la musique et que vouloir lui chanter  Ramona ne serait pas la meilleure entrée en matière pour être dans  ses bonnes grâces.
Que penser d'un monsieur qui vit comme un manant et qui se comporte  comme un aristocrate ?... Faut-il en déduire que « les anarchistes sont les  aristocrates de la classe ouvrière », comme l'écrivait joliment  Alexander Berkman, anarchiste suédois ? Que derrière chaque murge trône  l'idée d'un képi qu'on envoie valdinguer ? Que le monde, si complexe et  si cruel soit-il, demeure encore et toujours beau à regarder ?...
Monsieur Jadis a l'embarras du choix : une femme et deux enfants,  qu'il croise de temps en temps. Une maîtresse qui dort avec son mari et  qui, et qui, et qui… fait ce qu'elle doit quand elle estime le devoir  faire. Des fréquentations à la palette vive en couleurs que monsieur  Jadis ne compte plus et que sais-je encore… Un exemple ? A la volée, je prends Popo, alias Florence d'Arabie. Une devanture à  mettre le feu sous la banquise, un décolleté à t'enrhumer le nombril et  l'art consommé de la commande au Bar-bac à l'heure du croissant et du  café crème. A la question de Madame Jadis mère : « que souhaitez-vous  prendre », la Florence réponds sans hésiter : « Un croissant, chère  madame. Avec un grand pastis. Mais surtout : pas d'eau dedans, s'il vous  plaît. » Sans se démonter, la vieille, admirative devant la  découverte d'un nouveau cocktail : « Tiens, il faudra que j'essaie. » Je  vous l'ai dit : on ne chante pas Ramona à la maman de monsieur Jadis,  ni à la môme Popo non plus, même si cela lui fait passer parfois des  mauvais quarts d'heure.
Antoine Blondin, écrivain, chroniqueur, romancier, aimant Rimbaud, Fitzgerald, Baudelaire, Albert Londres autant que le rugby, le  cyclisme et l'alcool, faisait son métier avec beaucoup de sérieux, mais ne  se branlait pas le cortex avec des angoisses sur la gloire et la  postérité. Il vivait sa vie à la façon dont on prend une cuite, avec  plaisir et détachement. Il avait fait de celle-ci une fable et de ses  fuites la perspective d'un paysage pictural.
Que penser d'un homme sans étiquette à qui on en colle un tas ? Que  du bien, pardi ! Vivre à découvert en préservant le secret de ses  intimes convictions n'est pas aisé pour celui qui se nourrit grâce à sa  notoriété et dont chacun dans son entourage a une  rumeur à colporter, un témoignage à donner, une histoire à inventer. Vivre sa vie laissant  aux autres le soin de l'imaginer à sa place est affaire jouissive pour un  créateur. 
Grâce à l'abondance et à la disparité de son œuvre, Blondin n'aura écrit in fine qu'un seul ouvrage, celui de l'amitié et de la fraternité, martelant toujours la même phrase : « Je l'avais connu dans une salle de rédaction de la rue Réaumur, en un temps confus où l'expression n'avait guère plus de sens que salle d'eau ou salle de séjour. L'odeur de la forêt s'introduisit sur ses talons. …Il y avait du franciscain chez ce franc-maçon, du chouan chez ce communard. »
Grâce à l'abondance et à la disparité de son œuvre, Blondin n'aura écrit in fine qu'un seul ouvrage, celui de l'amitié et de la fraternité, martelant toujours la même phrase : « Je l'avais connu dans une salle de rédaction de la rue Réaumur, en un temps confus où l'expression n'avait guère plus de sens que salle d'eau ou salle de séjour. L'odeur de la forêt s'introduisit sur ses talons. …Il y avait du franciscain chez ce franc-maçon, du chouan chez ce communard. »
Au-delà de l'anecdote Antoine Blondin est né ici, a vécu plus  loin, s'est rendu a tel endroit, à écrit pour tel journal... Tant de ses  livres ont été adaptés au cinéma avec le succès que l'on sait, etc… Des renseignements que n'importe qui peut se procurer en  cliquant sur internet, mais surtout en franchissant le seuil d'une bonne  librairie et lire ses livres. J'aime la qualité de la  gomme qu'il usait ou qu'il n'usait pas courant après l'imaginaire pieds nus…
Allez après ça mettre une étiquette sur le dos d'un tel Seigneur, veilleur attentif des nuits et illustrateur d'une faune dont chacun  revendique sa part d'identité et de bonheur.
 
Bonjour les gens. Le corps et l'esprit, en tout circonstance et quoi qu'il advienne. Dead Can Dance en Zyque Du Jour, colonne de droite, tout en bas.
RépondreSupprimer