samedi 26 juillet 2014

Vols et viols

Halte !
Quand on passe la semaine dans la poussière des chantiers, pourchassant trous, fissures et bosses, grattant, ponçant, aplanissant, polissant, ripolinant, avec la patience et l’obstination de l’entomologiste s’attardant sur une colonie d’insectes, avec la radio pour compagne, on se dit que le divorce est consommé.
Cette énorme essoreuse à fréquence modulable fait tourner le tambour de sa machinerie à plein régime, nuit et jour, laissant dans son sillage des particules de cerveaux que les camions de ramassage des ordures ménagères sont impuissants à récupérer avant que le jour ne se pointe.
Au lever vous vous sentez plus sale et dépouillé qu’au coucher, malgré une nuit dite réparatrice, si je puis me permettre. Pourtant, je vous l’assure, je fais en sorte de n’écouter que de la radio de réputation, de l’estampillée « conscience citoyenne ». De la vraie bécane à manipuler du crétin !
La disparition des radars du Boeing 777 (on dirait du James Bond) de la Malaysia Airlines dans l’est de l’Ukraine a été un moment d’une émotion très intense. 239 humains à bord, parmi lesquels 4 français. Ralalà ! Il n’en fallait pas davantage pour que la boucle se noue au tour du cou de l’auditeur pour une strangulation mortifiante.
On se serre les fesses, parce que là c’est chaud ! Aussitôt de la spéculation intensive : « ... et s’il s’agissait d’un attentat ?... Oui, mais qui ?!...»
L’auteur du crime est d’abord suggéré, puis franchement désigné : la partie russophone de l’Ukraine est pointée du doigt, téléguidée à coup sûr par la Grande Russie et par ce diable de Poutine ! Les Etats-Unis prétendent détenir la preuve d’un attentat russophone. Même si aucune salle de rédaction n’a encore palpé l’ombre d’un soupçon, le matraquage atteint le moment crucial où l'on sent que l'on conduit le gogo vers le lieu de son sacrifice, le persuadant que c'est pour son bien. En attendant que ces « preuves irréfutables » soient étalées au grand jour, portée à la connaissance d'une justice franche, pour une condamnation sans appel, on suppute, on instille, on insinue, on imagine, on corrode, on pourrit les esprits, on manipule, au nom d’un statut obsolète : journaliste d’information !
Puisque nous sommes dans le vol et le viol des consciences, la désintégration du vol AH5017 qui s’est écrasé au Mali vous défragmente d’un coup aussi sûr que celui de la guillotine précipitant votre tête dans le panier pour un tour de piste. Beaucoup de français à bord ! 
Même si les corps sont difficilement présentables, le témoignage d’un proche de l’homme qui a vu l’homme qui a vu l’ours, dans le coin le plus reculé et sordide d’Hexagonie fera bien l’affaire dans ce grand concert de l’ignoble que la radio d’Etat colporte sans état d’âme. 
La semaine dernière nous nous étions quittés à trois cent et quelques morts dans la bande de Gaza et cela n’allait pas bien du tout pour les femmes, les viocs et les enfants, les fameuses victimes collatérales. Depuis, nous approchons les mille morts et selon des sources officielles les choses avancent dans « le bon sens » !...




Sous l'casque d'Erby


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